Per Pérennou |
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L'Ero Vili, une mine d'or pour TodtJe pense que c'est fin 43 [que j’ai travaillé sur le chantier], quand le concasseur a été mis en service. Mais ça a duré très longtemps car il y a eu des essais très difficiles, c'était l'un des premiers chantiers de concassage en France et même en Europe. Ce chantier est quelque chose d'unique, il n'y avait pas de chantier comme ça, il n'y avait pas de champs disponibles, pas de galets comme les Allemands ont trouvés [ici]. C'était une mine d'or. Il y avait là beaucoup d'équipes, mais c'était très cosmopolite puisqu'à l'exode en 1940, beaucoup de gens du Nord ont fuis devant l'avance des Allemands vers Dunkerque, et se sont réfugiés un peu partout, beaucoup en Bretagne, si bien que ces gens, qui pour la plupart étaient d'anciens mineurs ou bien des techniciens... et surtout beaucoup parlaient soit le polonais soit l'allemand, étaient disponibles pour faire des contremaitres et tout cela pour les Allemands et pour Todt. Chacun pouvait y aller travailler du jour au lendemainC'était très facile [d'y postuler et d'y travailler] : tout un chacun pouvait y aller tranquillement, du jour au lendemain. Ma grande honte, c'était quand même de Alors, on allait, on se présentait au chantier. Le chantier était ouvert, il n'y avait pas de fermeture, il y avait simplement des champs de mines vers les terres et sinon c'était ouvert sur l'océan obligatoirement. On se présentait soit à Plonéour, soit directement sur le chantier. Moi je suis arrivé et j'ai dis, puisque ma foi sans me vanter j'avais déjà fait un peu d'études quand même , j'ai dit : "je vais travailler au bureau". Alors ont m'a répondu "ha non, c'est complet, tu iras travailler sur la voie pour l'entretien de la petite voie sur la dune de galets". Alors j'ai dit "Bon, ben on y va". On stabilisait les rails, il n'y avait pas de traverses : elles étaient là, directement sur les galets. Cette dune, ce mur ! imposant ! qui faisait parfois 7-8 mètres de haut, 50 mètres de large, c'était impressionnant ! Il faisait parti de notre décor. Après, quand il s'est affaissé, beaucoup à cause des Allemands, on se trouvait tout nu, on n'avait plus notre mur ! Ce mur, c'était quelque chose d'impressionnant. On savait qu'ils (les galets) servaient à la construction du mur de l'Atlantique, donc on n'était pas dupe. Moi j'étais d'une famille de 14 enfants, tous les frères et soeurs avant moi, même après moi, étaient déjà au boulot. Moi j'avais la chance de pouvoir continuer un peu mes études. Je pensais : « Et si tu peux gagner un peu d'argent pendant tes vacances, ce serait bien que tu puisses offrir ça à ta mère ». c'est ce qui s'est passé. Les gens du pays y allaient un peu en tapis noir (tapinoi ?), ça ne se disait pas mais ...ça passait. Il fallait trouver du travail
On ne faisait pas trop de zèle, mais on n’a jamais trop sabotéLa plupart des gens étaient recrutés comme manœuvre sans spécialité. Moi j’ai posé des rails mais je n’était pas spécialisé là-dedans. On ne faisait pas trop de zèle, Après la guerre, ce qui est étonnant c’est qu’on a continué le chantier, mais avec les Français, ce qui fait qu’il y a eu une passation tranquille et c’est devenu l’exploitation, mais je crois que le concasseur a servi pour le chantier de la carrière (communale) mais aussi, pour la réserve de galets impressionnante. Mais là j’étais déjà parti en 44 dans la résistance. D’un côté j’ai travaillé pour les Allemands et de l’autre côté je m’étais inscrit chez les FFI contre les Allemands. Alors la morale était sauve sans doute pour moi. Pendant la guerre on ne parlait pas du concasseur. Non, c’était quelque chose de discret mais beaucoup de gens y ont travaillé. Peut-être 300 ou 350 personnes disséminés un peu partout. Les gens du pays changeaient beaucoup, les autres, du Nord, des Ardennes, des Belges, des Hollandais avaient des chambres en ville. Il y avait même un petit ramassage avec les cars allemands, Mercedes et Magirus, qui faisaient le tour pour aller récupérer des agents de Todt qui habitaient à Pont l’Abbé ou ailleurs, et d’autres aussi, mais les gens n’aimaient pas du tout qu’on les voie dans les cars, ils préféraient aller à pieds, discrètement. Moi j’habite à un bon kilomètre de là donc il n’y avait pas de problème et puis à l’époque vous savez, marcher à pieds n’était pas un problème. Pour écouter l'interview vous pouvez téléchargez le fichier au format mp3 : |